Crime

Comme dans un épisode de l’inspecteur Colombo, dès l’entame du livre, l’auteur nous révèle l’identité des tueurs et l’horrible crime (exécuter un enfant de sang-froid) dont il se sont rendus coupables. Son intérêt n’est pas de démasquer les criminels mais de comprendre leur mobile. Car leur profil a de quoi stupéfier les plus cyniques :  des fils de milliardaires, surdoués et promis à un avenir radieux. Les deux complices ont même exigé une rançon de 10 000 dollars qui, pour eux, s’apparente à de l’argent de poche. Alors pourquoi ? À quels moments des individus sains d’esprit, délivrés du besoin, décident-ils de faire une chose aussi abjecte ?

Par jeu - aussi cruel soit-il ? Par ennui ? Pour une quelconque perversion ? Par défi intellectuel, en planifiant minutieusement ce qui devait être un crime parfait ? Pour faire l’expérience du mal absolu, gratuit, inexplicable ? Pour se sentir totalement libres, affranchis de toutes contraintes, de toutes lois ? Sous l’influence d’une théorie contestable, en l’occurrence celle du surhomme popularisé par Nietzsche dont l’un des tueurs est un admirateur ? L’examen de ces hypothèses, sur fond d’une psychanalyse balbutiante, s’avère passionnante.

Le lieu (Chicago) et l’époque ont leur importance. On sort de la première guerre mondiale, on a versé trop de sang, Al Capone n’est pas encore au fait de sa gloire. Il y a réticence à garnir la potence.

Le procès, dans la grande tradition américaine, voient s’affronter deux cadors mais aussi, deux conceptions de la société. Leurs échanges (datés des années 20) laissent pantois sachant que cent ans plus tard, les droits les plus fondamentaux sont remis en question de l’autre côté de l’Atlantique.

Tiré d’un horrible fait divers qui a secoué l’Amérique, ce roman est un tour de force. Meyer Levin est parvenu à rentrer dans la tête de chaque protagoniste et c’est pourquoi cette histoire vraie, revisitée, vous hantera durablement.

Bilan :🌹🌹🌹

Les deux Beune

Les deux Beune

Sugar street

Sugar street