Moi, le glorieux

Moi, le glorieux

Moi, le glorieux, c’est Albert Vandel (dit Bobby la Baraka), un ogre métaphorique qui, du haut de ses 130 ans et de ses 140 kilos, incarne l’Algérie française.

Il a défriché, irrigué ces terres arides habitées par des barbares auxquels la France a montré la lumière. À la sueur de son front, il s’est engraissé pour devenir ce monstre truculent, amateur de chère, celle qu’on dévore en se souillant, et de chair, celle qu’on baise en criant victoire. Rien ne doit lui barrer la route. Il humilie les femmes qui lui résistent, il punit les hommes qui le défient. L’Arabe est au mieux un outil, au pire un obstacle.

Mais bientôt, le vent tourne. Ce n’est plus la mer qu’il respire à pleins poumons, c’est la poussière des foules ulcérées, le sang des colons massacrés pour venger un siècle de servitude. Ah les ingrats ! s’indigne Vandel. Ont-ils oublié leur misère passée ? À quel futur prétendent ces ignorants ?

La fin approche. Défendu par quelques mercenaires, cajolé par une amante conciliante, Albert Vandel se lamente dans un monologue haletant et vibrant. Un récit mûri dans la démesure, sans fards ni censure, fait de panache et de turpitudes, comme s’il fallait tout dire, tout décrire, jusqu’à l’inconcevable pour absoudre enfin l’absurde idée sur laquelle des générations de colons se sont goinfrées : accaparer une terre sous prétexte qu’elle méritait un destin meilleur, c’est-à-dire à leur goût.

J’ai adoré le style, la beauté de la langue et la profusion des images convoquées. J’ai fait fi des répétitions, des anaphores et de l’outrance des emportements. Tout, jusqu’à l’excès, donne à ce texte sa force et son caractère addictif (je ne fais référence à aucune page – elles seraient bien trop nombreuses).

Bilan : 🌹🌹🌹

Baumgartner

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Rendez-vous à la Porte Dorée

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