Carnes

Carnes

Salive et muqueuses sont de retour.
Une fois franchie la frontière de l’outrance et de la vulgarité, il n’y a plus de retour possible. Terminus anus. Suffit-il d’avoir le verbe trash pour se faire entendre ? Esther Teillard n’est pas Virginie Despentes et de Céline, elle n’a que le sac à main.

Je n’ai pas lu de critiques mais j’imagine que ce roman a dû ravir les écrivains aigris (genre Beigbeder), les vieux journalistes en quête d’underground (Les Inrocks) et les machos que la vague meetoo a mortifiés.

« Carnes » les rassure parce que son autrice y parle des femmes… comme un homme des années 80. La femme ne mérite son genre que par la générosité de ses formes (obsession du nichon). Le plat devient suspect (p118) : anomalie ou trahison. Il faut du pulpeux, de la starlette de Russ Meyer.

Pas d’histoire mais une galerie de personnages bien fichue : Hestia la fille de l’Est, les trans Médée et Debora et bien-sûr les cagoles, décrites avec talent par la jeune écrivaine. « Carnes » s’apparente au manifesto d’une génération marquée par la question du genre et de la déconstruction.
Je n’ai pas été convaincue par l’aller-retour constant entre Paris et Marseille. J’aurais préféré qu’Esther Teillard nous parle exclusivement de sa ville d’origine. Elle la comprend, elle la transpire (exemples aux pages 22, 44, 108, 174) sans pour autant rivaliser avec Izzo ou Giono.

Du point de vue de la forme, son usage des comparaisons est très inégal :

Ça va du pire (« À Marseille, les meufs sont moitié voilées, moitié à poil, comme la pizza moit-moit, anchois-fromage ») au meilleur (« Le désir est dans la rue et gratte les yeux comme du pollen d’avril »). Elle abuse aussi de la forme démonstrative : « Aimer, c’est… », « Marseille, c’est… », … Et c’est… Super agaçant.

Dans son roman, Esther Teillard affirme que les vrais punks n’ont pas de crête. Correction : la vraie punk ne se sent pas obligée d’aimer son roman, de s’exciter sur sa prose déjantée telle une bourgeoise pré-pubère devant son premier gonzo. La vraie punk a eu ses premiers émois en matant les contes immoraux de Walerian Borowczyk. Nuance d’importance.

Appréciation :🔪🌹

Immortels

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