James
J’en avais parlé dans ma chronique du livre de Laure Murat, « Toutes les époques sont dégueulasses ». Elle y citait le roman de Percival Everett comme le moyen le plus fin et le plus judicieux de dénoncer les abus d’une période historique tout en évitant la censure tous azimuts.
Voici donc Jim (James), l’esclave indigent et soumis des romans de Mark Twain, embarqué dans des aventures où il tient le rôle principal. Le petit Huckleberry qui l’accompagne a beau avoir la peau claire, il dépend vite de l’homme noir, démontrant ainsi qu’intelligence et connaissance ne sont pas tributaires d’une quelconque pigmentation. Hors de son cocon de coton, le petit homme blanc s’effarouche vite.
L’auteur ne cite pas Candide de Voltaire par hasard. Son histoire s’en inspire faisant de la fausse naïveté un moteur narratif. Jim n’est pas celui qui pose la question mais celui qui maquille sa réponse afin de la rendre la plus simpliste possible, avec un accent et dans un sabir vernaculaire qui le stigmatisent d’emblée.
C’est d’ailleurs ce qui m’a le plus intéressée : la maîtrise de la langue comme une arme infaillible (p53, p273). Ce n’est pas le pistolet de Jim qui effraie le juge mais la manière parfaite dont il maîtrise l’anglais. L’honneur et le salut par le savoir. Le livre qui délivre.
Un roman subtil que j’ai trouvé un peu décousu, parfois égaré dans les méandres du Mississipi (j’ai cependant bien aimé le clin d’œil au roman d’Hemingway p247), avec un final aux velléités un peu trop tarantinesques (Django).
Appréciation : 🌹🌹




