La mort moderne

La population augmente, les ressources viennent à manquer et la jeunesse doit supporter le poids économique des boomers. Sur cet implacable constat, un comité d’expert suédois étudie la possibilité de hâter la disparition des plus anciens. Ce roman est le compte-rendu de leurs discussions.

C’est le contenu philosophique de ces discussions qui rend le livre passionnant. Au nom de quoi, de quel droit, une société déciderait-elle d’éliminer ses citoyens les plus âgés ? Ou encore : qu’est-ce qui est utile, essentiel (ça vous rappelle quelque chose) ?
Les débatteurs s’affrontent. Les cyniques demandent de ne pas négliger l’utilité économique et politique des retraités : ils votent conservateur et font travailler les laboratoires pharmaceutiques dans leur quête désespérée d’une vie rallongée. Les humanistes dénoncent la négation du droit naturel et de la dignité humaine. Tous les hommes se valent, vieux, malades ou handicapés.

Dans ce séminaire, on discute hiérarchie des valeurs. Dieu et le hasard planent sur leurs échanges, tout comme le spectre du nazisme. 

Cela m’a rappelé ce problème qu’on nous posait au lycée pour discuter des questions éthiques : un bateau est trop lourd, une personne doit passer par-dessus bord pour sauver tous les passagers. Laquelle jetez-vous ? Le prêtre, le brigand, la femme enceinte, le jeune enfant, le marin qui connaît la mer… ?
Le comité suédois imagine des stations terminales où les vieux se rendent de leur plein gré. Ça ressemble à des scènes du film « Soleil vert », dans lequel les corps des euthanasiés sont transformés en pastilles nutritionnelles.

Ce livre m’a fait l’effet de l’admirable « Controverse de Valladolid » de Jean-Claude Carrière ou de « La conférence de Wannsee » de Peter Longerich : des types qui discutent tranquillement d’une hypothèse abominable.

Un ouvrage qui fait réfléchir, et vous teste sur votre capacité à vous indigner.

Bilan : 🌹🌹