La nuit au coeur

La nuit au coeur

Bouleversant.
C’est un des romans les plus justes et les plus profonds que j’ai lus sur le féminicide. Sans doute parce que Nathacha Appanah est à la fois victime (glaçant chapitre 4/première partie) de son amant (« ce soleil noir ») et porte-parole de ces femmes qu’on a inhumées une seconde fois par le silence.

Les livres sur l’emprise et le féminicide ne manquent pas. Il n’y en aura jamais assez pour nous rappeler que trop de femmes sont des proies dans leur propre foyer, sous la menace d’un « terrorisme intime ». Avec ces trois histoires, Nathacha Appanah parvient à nous émouvoir sans tomber dans le pathos. Elle n’en a pas besoin, raconter les destins brisés d’Emma, Chahinez et Nathacha suffit. Encore faut-il le faire avec la décence et la dignité qui s’imposent. L’auteure se méfie de la dérive journalistique et je comprends ici en quoi le choix du roman (donner chair à la brutalité des faits) permet d’énoncer la vérité (p169).

Comment transformer la douleur en littérature ? Comment mettre des mots sur l’horreur ? Comment éviter que sa souffrance, quand on a la chance d’être encore vivante, n’éclipse la mémoire de celles qui ont été assassinées ? Tout en écrivant, l’auteure parvient à répondre à ces questions.

J’ai été particulièrement touchée par l’histoire de Chahinez et révoltée par l’injustice qu’elle a subie, par l’incapacité du système juridico-policier à enrayer la mécanique destructrice de son mari violent. Le chapitre 8 qui raconte son agonie me hantera à jamais, comme un rappel brutal de ce qu’un homme peut faire au nom de l’amour, ce mot soudain dévoyé, souillé, porteur de malheurs.

La page 145 est fondamentale, remercions l’auteure de l’avoir insérée. Elle doit être largement diffusée dès la classe de seconde. C’est peut-être déjà le cas, du moins je l’espère.

Appréciation : 🌹🌹

 

 

Tressaillir

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