La nuit ne dure pas

Tout d’abord merci à @editionsrivages @editionspayot pour l’envoi de ce roman… que je n’aurais jamais acheté. Jules Gassot a du talent et de l’humour, c’est indéniable. Son récit est mené tambour battant (les scènes d’agapes fromagères notamment), rythmé par un style incisif qui se prête aux ellipses et aux détournements. Il excelle dans la description physique de ses personnages (ex : p60, p89) et dans les dialogues (ex : p18, p97) – beaucoup trop rares à mon goût. Mais j’ai eu comme une impression de déjà lu - chez des auteurs comme Fab Caro, Arnaud Le Guilcher ou Nicolas Rey. Je m’explique. Ces auteurs se posent en spectateurs de leur récit (largement inspirée de leur propre vécu), à l’affût du sarcasme, comme s’ils n’avaient qu’un but : se moquer de la situation qu’ils décrivent. Ils recherchent l’aphorisme, la « punch-line ». Chez ces auteurs, la narration est d’abord un prétexte à la dérision. Certains y verront de la sagesse, moi j’y vois surtout du cynisme et de la lassitude. La construction de leurs paragraphes est systématique : quelques phrases pour expliquer le contexte, usant de métaphores ou d’hyperboles (à la manière d’un Meurice ou d’un Pastureau) ; une chute se voulant drôle ; et pour finir, une sorte de maxime ou de morale souvent ramenée aux obsessions du narrateur (leur alter ego). Jules Gassot appartient à ce courant littéraire prolixe qui met en évidence une ligne de démarcation entre les écrivains qui usent du roman comme un miroir déformant du quotidien, et ceux qui explorent des voies plus fictionnelles et plus risquées dans le but d’inviter le lecteur à la découverte. J’avoue m’intéresser beaucoup plus au second, d’où mes réserves sur ce roman, pas désagréable à lire (comme un Paris Match au coin du feu) mais qui s’oublie vite en raison de la légèreté de son sujet. Je ne connais pas les livres précédents de cet auteur mais je suis curieux de voir ce que sa plume peut donner sur une histoire plus consistante et des personnages plus approfondis.

Bilan 🔪🌹