Tambora

Tambora

Dans la première partie de son livre, Hélène Laurain met toutes ses tripes, toutes ses viscères même ; j’ai eu l’impression de disséquer des grenouilles ou de contempler un tableau de Francis Bacon. Un mélange de gore et de poésie qui fait de ce livre une version hard core de Laurence Pernoud (exemples aux pages 32, 55 et 149).

Si l’exercice consistait à montrer à ses filles que leur naissance lui a coûté, qu’elles n’ont pas été livrées par une cigogne, c’est réussi.

S’il fallait montrer que le langage de la maternité (« le fruit de mes entrailles », « la chair de ma chair ») est parfois brut, voire brutal, c’est réussi.

Je me suis ennuyée mais je ne forcerai pas ma critique : je ne connais rien de la grossesse ni de l’accouchement. Pour autant, le talent d’une auteure n’est-il pas de transmettre des émotions aux lecteurs sans qu’ils en aient connu la source ? Je me souviens par exemple de Kevin Powers expliquant ce qu’on ressent au plus fort des combats : « c’est comme si tu t’apprêtais à avoir un accident de voiture à chaque seconde ».

Dans la deuxième partie du livre, on ne gagne pas au change : on passe de « j’accouche ! » aux couches. On a quitté l’hôpital pour le foyer. Pour évoquer les enfants qui grandissent, les mots de l’auteure sont justes, emprunts de tendresse et de bienveillance (« Il n’y a qu’une posture possible : la disponibilité » ; « Ce dont j’aimerais vous protéger : la dissolution de la légèreté »).

Une odyssée du quotidien maternel (p140) qui donnera une leçon de réalisme aux jeunes mamans trop enjouées (à quoi bon faire des gosses dans ce monde dystopique ?) Je prédis à ce livre le prix Wepler pour son style débridé et son audace expérimentale.

Appréciation : 🔪🌹

Un frère

Un frère