Le monde n'existe pas
La beauté peut se muer en malédiction. L’apparence est trompeuse et camoufle le mensonge. Adam Vollmann n’y songe pas en découvrant le visage angélique d’Ethan Shaw, offert en pâture à des média colporteurs de sensations fortes.
Pourquoi Ethan aurait-il violé et tué la sensuelle et virginale Clara Montes ? Ethan, le bellâtre que les filles du lycée se disputaient et que des garçons comme Adam admiraient (« Il nous grandissait ; Il était nous-même transfigurés »), n’avait rien d’un détraqué.
Alors Adam Vollmann retourne à Drysden, archétype de la ville américaine étouffée par son conformisme (p68). Quelque chose ne tourne pas rond. Ethan a tout de la victime expiatoire, les preuves manquent et cette Clara Montes paraît ne jamais avoir existé. Alors à quoi rime cette pantomime ?
Dans une atmosphère à la Twin Peaks de David Lynch, Adam Vollmann se heurte à l’hostilité des habitants, entre un fantôme présumé d’Ethan (« Il est un homme du départ qui ne s’en va jamais ») et des témoins présumés qui s’illustrent plus par leur talent d’acteurs que par leur goût de la vérité (« Fake est le nom de code du monde moderne »).
J’ai aimé l’enquête, le personnage de Vollmann, la critique de l’emballement médiatique, de la mesquinerie de province et d’une époque gangrénée par ses soupçons du complot et son désir cathartique de récit (p160).
Je suis moins convaincue par la dernière partie du livre, comme si l’auteur était gêné par son propos : l’absence de réalité, la fin des certitudes et le règne du faux.
Appréciation : 🌹🌹