Les désorientés

J’ai décidé de relire « Les désorientés » après avoir vu « L’insulte » (Ziad Doueiri), l’excellent film sur les traumatismes de la guerre civile libanaise. J’ai découvert Amin Maalouf avec « Les croisades vues par les arabes ». Depuis, il fait partie de mes auteurs de référence sur le Moyen-Orient, région à la fois complexe et passionnante. Le héros du roman, Adam, est le double d’Amin Maalouf. Comme lui, il a quitté le Liban dans sa jeunesse. Son meilleur ami est sur le point de mourir. Il lui demande d'oublier leurs vieilles querelles et de venir le saluer une dernière fois. Adam arrivera trop tard à son chevet. De ce douloureux échec naitra le projet de réunir ses amis d'autrefois. La correspondance qu'Adam entretient avec chacun d'entre eux permet à l'auteur d'ausculter les maux de son époque. Il ne se dérobe pas. Avec cet ouvrage, Maalouf règle ses comptes. Avec les extrémistes qui prennent la religion en otage : « Ils te parlent du licite et de l'illicite, du pur et de l'impur, avec des citations à l'appui. Moi j'aimerais qu'on se préoccupe plutôt de ce qui est honnête, et de ce qui est décent. Parce qu'ils ont une religion, ils se croient dispensés d'avoir une morale ». Avec une génération d’opportunistes qui ne cesse d’attiser le feu : « Nous nous proclamions voltairiens, camusiens, sartriens, nietzschéens ou surréalistes, nous sommes devenus chrétiens, musulmans ou juifs, suivant des dénominations précises, un martyrologue abondant, et les pieuses détestations qui vont avec ». Amin Maaloufest critique du monde arabe qu'il suspecte de verser dans la victimisation. Il est nostalgique d'un temps où l'évocation de l'Orient faisait rêver. Les années ont passé et du sang a coulé sous les ponts. Est-il trop tard pour refaire le monde ? Avec sa bande de copains, avec Semiramis, son amour de jeunesse qu'il avait oubliée d'embrasser, Adam, pardon Amin, s'attaque à la mémoire du Levant pour espérer l'aube d'un jour nouveau. 

Bilan : 🌹🌹