Orléans

Le roman de Yann Moix aurait dû figurer sur la liste du Goncourt. Mais ce roman est un durian (l’auteur aime les fruits asiatiques). Il sent mauvais (les récentes polémiques familiales, les productions antisémites). Il pique (l’agressivité du tribun télévisuel). Il intrigue, il attire mais au final, il est exquis ! À la fin du premier chapitre, j’étais cependant face à un dilemme. Ou je me laissais influencer par les soupçons de mythomanie aggravée, et dès lors, le martyr supposé de l’auteur devenait scandaleux, illisible. Ou je faisais abstraction de Moi X Moi = Moix, de son goût exagéré pour la lumière, et je ne m’intéressais qu’au texte. J’ai choisi la deuxième option, sachant que l’autofiction m’indispose - sauf si le vécu est fort et le style mémorable. C’est le cas de ce livre, truffé de trésors, de passages inoubliables et fulgurants : sur la mère (p17), la souffrance (p39), le désir (p91), l’écriture (p100), la libération du père (p130), l’optimisme (p176), le génie (p240), l’aventure des femmes... J’ai parfois remplacé son « je » par un « il », comme s’il parlait d’un autre. Son récit devient alors universel : un enfant que la littérature protège des agressions (parentales). Les pages d’amour dédiées à ses sauveurs, Péguy, Gide, Sartre ou Ponge, sont émouvantes.  Je me suis moins intéressée au « dedans » (le foyer de violences) qu’au « dehors » où la sincérité affleure, où la poésie de l’auteur éclate, débarrassée de la nécessité d’exorciser le mal. Je suis d’avis qu’on pardonne son exhibitionnisme à cet amant des lettres, à cet enfant terrible de la littérature française qu’est Yann Moix. Ses excès, ses turpitudes sont les produits de sa seule faiblesse : enrager d’écrire pour exister.

Bilan : 🌹🌹

Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon

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Un monstre et un chaos

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