Une façon d'aimer

Une façon d'aimer

Et si la beauté d’une histoire, c’était de ne rien en attendre ? Pour échapper aux conventions, pour s’affranchir d’un dénouement trop attendu ? Et si la grâce venait seulement des silences et des non-dits ?

C’est un peu ce que j’ai ressenti à la lecture du dernier roman de Dominique Barbéris. Une volonté de ne pas céder à la facilité, une envie furieuse d’explorer d’autres possibles, ou plutôt, d’autres impossibles. À quoi bon l’abandon du corps quand l’esprit suffit ? C’est l’examen des ressors cassés, des empêchements et des rendez-vous manqués qui donne au texte sa texture.

On suit Madeleine, une Nantaise sans histoire (« … cet air provincial décourageant, à la fois sévère et désemparé, avec lequel elle cherchait à donner le change »), une femme que rien n’avait préparé à la touffeur de Douala, aux jugements blasés de sa petite communauté d’expatriés unis par l’ennui et la nostalgie. Ils aiment se souvenir de la France mais pour la majorité d’entre eux, il est déjà trop tard (« J’aime Douala. Quand je sors de l’Akwa Palace à deux heures du matin, la nuit y est aussi chaude qu’à six heures, et elle a cette odeur d’épices, d’estuaire et de pourriture qu’on ne retrouve nulle part »). Ils sont devenus inamovibles comme ce manguier, sur la place du village, dont on a perdu l’âge.
Madeleine n’a rien à voir avec la chanson éponyme de Jacques Brel et même son charme, métallique, à la Michèle Morgan, intimide plus qu’il n’attise. Mais Loïc Prigent rôde. Lui connaît l’Afrique. Lui ne craint pas l’épaisseur de la nuit. Quelque chose, en elle, loin d’une promesse de bagatelle, l’a rendu friable.

Un roman susceptible de combler celles et ceux qui, comme moi, ont lu plusieurs fois « La ferme africaine » de Karen Blixen ou se délectent encore du vivifiant « Coup de torchon » de Bertrand Tavernier.

Bilan : 🌹🌹

Aliène

Aliène

Frappabord

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